L'abbé VISAGE et la résistance

Témoignage de madame Blin, veuve de Romain Blin, compagnon du père Visage dans la Résistance.

Monsieur l'abbé VISAGE entra en résistance en 1942.

Il prit cette décision un jour qu'il était allé au terrain de l'Etoile, terrain de sport du patronnage paroissal. C'était un endroit où il avait organisé une équipe de foot et où il y avait quelques abris. Il y vit un allemand s'asseoir sur le drapeau français qu'il avait trouvé dans les vestiaires. Révolté, il décida d'entrer en résistance et contacta le réseau Etienne Leblanc ainsi que Pierre Charrier qui était un membre actif et connu de la résistance locale.

A partir de ce moment, l'abbé Visage contacta quelques jeunes en qui il avait confiance et forma un noyau solide de de Résistance à Vitry aux Loges.

L'abbé Visage hébergeait chez lui un jeune ingénieur radio qui se cachait. Cet homme possédait un poste-émetteur. Il fut donc facile d'organiser des lieux de parachutage. Les messages parvenaient chez l'abbé Visage par Radio Londres sous cette phrase " Les sangliers sortent du bois ".

Le premier parachutage eut lieu le 5 mai 1944. Les containers d'armes et de munitions furent enfouis dans la forêt à proximité des lieux de parachutage. Fin juin 1944,il y eut un parachutage où huit Anglais furent largués. l'un d'eux fut accroché dans un chêne. il se détacha et tomba au sol se cassant une jambe.

L'abbé Visage organisa les soins et le fit conduire chez l'institutrice du village qui garda le blessé durant toute sa convalescence. Un médecin de Chateauneuf sur Loire, le docteur Fargette venait le soigner. Sans doute informée par l'existance de ce réseau, la Gestapo intervint à Vitry aux Loges.

Un jour, un jeune inconnu se présenta chez l'abbé Visage et demanda à faire partie de la Résistance. Ce dernier s'avéra être un milicien. L'abbé Visage fit l'ignorant et le jeune repartit. Deux jours plus tard, la Gestapo vint à Vitry aux Loges et arrêta un jeune de la Résistance.

Ce résistant fut gardé par un allemand au carrefour des Quatre Routes pendant que les autres partirent vers le presbytère. Pendant ce temps, certains jeunes de la Résistance, informés de l'arrestation de l'un des leurs, s'étaient précipités chez l'abbé Visage. Ils n'eurent que le temps de l'informer et de sauter par dessus le mur du jardin du presbytère. L'abbé Visage fut sauvé de justesse.

Pendant qu'ils sautaient le mur, les allemands entrèrent et interrogèrent durement les deux cousines de l'abbé Visage qui logeaient au presbytère. Elles dirent que des jeunes gens étaient venus chercher le prêtre pour se rendre auprès d'un mourant.

Un groupe de jeunes résistants n'était pas resté inactif. Certains d'entre eux prirent une camionette qui était garée dans la cour de l'école dans laquelle étaient entreposées des armes.  Ils se rendirent au carrefour des Quatre Routes pour y délivrer leur ami. Il y eu une fusillade. L'allemand fut tué et la voiture inutilisable. Il sauvèrent ainsi leur ami.

Entendant la fusillade, les six allemands qui étaient au presbytère revinrent rapidement avec leur voiture au carrefour des Quatre Routes et emmenèrent leur mort.

Dès ce moment, il n'était plus possible d'organiser dans le village une quelconque réunion. L'abbé Visage regroupa les jeunes résistants qu'il fit loger chez un garde forestier à Chicamour.

L'abbé Visage était de santé fragile. Il ne se nourrissait que de laitages. Il eut une paratyphoïde. C'est un médecin de Chateauneuf sur Loire, le docteur Sirot, qui est venu le chercher sur sa mobylette. Il le soigna chez lui, puis l'abbé Lenoir fit recevoir l'abbé Visage à Germigny d'où il ne put revenir que vers le 20 août 1944.

Le maquis de Vitry aux Loges

Discours fait lors de l'inauguration de la rue Abbé Visage.

Le colonel O'Neil, installé dans la petite ferme de " La Folie " à Vitry aux Loges, commença le 18 juin 1944 la formation d'un maquis composé de candidats à l'école Polytechnique et à Saint-Cyr, auquels vinrent se rallier des réfractaires cachés dans la région par l'abbé Visage, curé de Vitry aux Loges et une dizaine d'hommes du maquis de Lorris.

Le camp était installé à mi-chemin entre le carrefour de Sercoeur et la route d'Ingrannes, sur le territoire de Sully la Chapelle, avec l'autorisation de monsieur le duc de La Rochefoucault, propriétaire de la forêt. Ce maquis était surveillé et protégé par l'équipe de l'abbé Visage qui fut l'animateur de la résistance dans ce secteur.

Son groupe de Résistance naquit le 8 décembre 1942; le jour où la municipalité accepta de désigner dix jeunes gens pour aller travailler en Allemagne. Ces réfractaires furent aussitôt placés dans des fermes par les soins de l'abbé Visage et, en peu de temps, son presbytère reçut une vingtaine de jeunes désignés pour  travailler en Allemagne ou traqués par la Gestapo. Ils attendaient chez lui le temps nécessaire pour être camouflés, soit dans le Gâtinais, soit en Sologne, pourvus de fausses cartes d'identité, d'alimentation et de faux certificats de travail.

Puis ce furent les chefs de la Résistance qui passèrent chez lui, ainsi que chez monsieur et madame Blin à " La Pépinière " : l'abbé Georges Thomas, le colonel Marc, le commandant Saint-Paul, le général De Beauchène et tant d'autres. Un jeune ingénieur radio, Guy Robert, caché au presbytère, mettait au point les postes émetteurs qui assuraient la liaison de la Résistance avec Londres.

Le maquis de la forêt d'Orléans.

Quand au printemps de 1944, la défaite allemande apparut fatale et prochaine, le colonel Rondelay fut chargé par Londres de coordonner les efforts de la Résistance française. Il proposa à son adjoint, le colonel O'Neil, de constituer pour la région un fort maquis dans le Loiret.

Le colonel O'Neil projeta tout de suite une concentration de trois mille hommes dans la forêt d'Orléans autour du maquis de Vitry aux Loges qui en aurait été le noyau. Il installa son PC dans une ferme abandonnée à Vitry aux Loges, " La Folie ". Le maquis de Vitry aux Loges fut donc fondé avec d'excellents éléments et bien pourvu en armes, grâce aux parachutages obtenus de Londres par le commandant Saint-Paul. Une attaque allemande, dont il fut victime, l'obigea a se replier dans la région de Lorris.

La région étant sévèrement surveillée par la Gestapo, le plan initial d'une forte unité de résistance se trouva limité aux maquis de Vitry aux Loges, de Chambon, de Lorris fusionnés sous le commandement général du colonel O'Neil.

L'abbé Visage hébergea même un déserteur allemand qui avait été envoyé au repos en Charente. Il en avait profiter pour déserter et après d'incroyables aventures s'était réfugié au presbytère.

L'abbé Visage facilita les parachutages. Le premier d'entre eux eut lieu le 5 mai et une quinzaine de containers d'armes et de postes émetteurs tombèrent du ciel. Le 17 mai, quatre avions parachutèrent une trentaine de containers et huit soldats anglais. L'un d'eux fut sérieusement blessé, il était resté accroché dans un arbre. Il fut transporté chez mademoiselle Michon, directrice de l'école de filles, et soigné par le docteur Fargette de Chateauneuf sur Loire, ainsi que le capiaine Albert qui avait été blessé précédement.

Quinze jours plus tard, le soldat anglais fut reconduit de nuit par Romain Blin au camp des " Cayettes " où il rejoignit ses camarades.

Le soir du 11 juillet 1944, un jeune homme désireux, disait-il, d'entrer au maquis se présenta au presbytère en se recommandant de personnes connues. Monsieur le curé, méfiant, l'éconduisit. Ce visiteur n'était autre que Jacques Eulot, milicien qui fut fusillé après la libération.

Le 13 juillet, cinq jeunes gens du groupe de Résistnce de Vitry aux Loges (Pierre Deschamps, Henri Etcheto, Pierre Pelletier, Yves Maheas, Martin Portet) apprirent que sept agents de la , ils se rendirent au presbytère  Gestapo venaient d'arrêter un autre jeune de Vitry aux Loges, René Choquet. En toute hâte, ils se rendirent au presbytère pour avertit l'abbé Visage. Ils repartirent aussitôt en escaladant le mur de clôture du jardin et allèrent avertir le capitaine Albert blessé et soigné à l'école des filles.

Celui-ci donna l'ordre de prendre la camionnette dans laquelle se trouvait des armes pour aller délivrer René Choquet au square ou il était gardé par un allemand. Martin Portet, qui descendit le premier fut blessé par l'allemand, sa mitraillette s'étant enrayée. Les autres mitraillèrent l'allemand et la voiture et délivrèrent René Choquet des mains ennemies.

Pendant ce temps, l'abbé Visage escaladait le mur du jardin et gagna la forêt par le parc du " Plessis " échappant de justesse aux six agents de la Gestapo arrivés au presbytère pour l'arrêter. En entendant la fusillade, les allemands repartirent très vite au square. Ils y trouvèrent leur camarade tué et la voiture inutilisable. Ils repartirent tous dans le véhicule qui les avait conduit au presbytère.

L'abbé Visage regroupa ces jeunes gens dans la forêt pour y prendre les armes où elles étaient enfouies. Ensuite, ils trouvèrent refuge chez un garde forestier, André Galopin à Chicamour, mais ils ne purent y rester longtemps à cause du danger de la route.

Le groupe revint quelque temps dans la forêt de Seichebrières. Averti par l'oncle de l'un d'eux (Louis Dargent) que les allemands prenaient des otages dans le village, il rejoignit le maquis de Lorris.